jeudi 15 mars 2012

LIPSTICK POP


Je me souviens. Un Boeing 757 de la compagnie Delta. Vol n°140. Marc Laguna (La Muerte), Yourek Duri et votre serviteur. Nous rentrons du tournage de "12H33", pas le disque, le film. Un tournage étrange et éreintant. Je suis venu à New York pour achever un deuil, pour tenter de mettre de l'ordre, pour passer un coup de téléphone. J'ai dépensé une fortune dans les Jukes Box et dans des disques de Billie Holiday et Bob Dylan. J'ai acheté ses "Chroniques" que j'ai commencé à lire assis sur des marches dans Union Square alors qu'on shootait "Corrina Corrina". J'ai passé mon coup de téléphone mais la fille du nord n'a pas répondu. J'ai chialé sur le combiné argenté et Marc Laguna m'a observé de loin, mais sans filmer cette fois. Hier, dernier jour du tournage, Marc apprend la mort de son père. Terrassé il s'obstine à poursuivre le tournage. A la nuit tombée, Yourek nous emmène dans les bas-fonds de Chelsea, dans des clubs peux recommandables. On va voir des filles. C'est ce genre d'endroits que nous avons fréquenté toute la semaine durant, des coins louches, avec des impacts de balles dans les murs et des entailles de couteaux dans les comptoirs.  East-Village, Lower East-Side, Chelsea, Coney Island... Le New York des brochures, je ne l'ai jamais aperçu. Même pas Central Park. Tard, tard, vraiment beaucoup trop tard cette nuit-là, nous devons nous sauver d'un bar à filles car le scénario vire au vinaigre. Nous nous faisons alpaguer par des flics de mauvaise humeur 3 blocks plus loin. Yourek leur tient tête avec son anglais teinté d'Irlande. Yourek, le Mod qui a bastonné de l'angliche dans les rues de Belfast. Les flics ne veulent pas croire que nous sommes belges, les flics deviennent grossiers, Yourek les menace. Moi je suis dans la bagnole, les mains sur les genoux et un cop qui me fixe avec la main sur son 38. J'enregistre l'altercation avec un micro planqué dans ma poche. Enfin soit. Je n'arrive toujours pas à dormir. Je passe mes courtes nuits à la fenêtre du salon de notre appartement du 35ème, entre pont de Brooklyn et lumières de la cité infinie. Je regarde vers le nord, je pense à la fille du nord. Retour à l'oiseau métallique et désert. Il y a une fille dans la rangée du milieu. Elle est seule. Je la regarde tout le temps. Elle me regarde tout le temps. 7 heures durant. Il n'y aura pas un mot, pas un geste. Dans la bagnole sur l'E40 en rentrant de Zaventem, je saisis un bout de papier et griffonne l'ébauche de "L'Inconnue du Vol Delta 140". 7 ans plus tard, cette chanson a enfin trouvé son chemin vers un disque. Celui de Mlle Nineteen. Simplement je l'ai mise au masculin. Mlle Nineteen m'a avoué que c'était peut-être bien sa préférée. J'ai aussi joué un peu de Gretsch Country Classic '62 mais le graphiste a oublié de le mentionner sur la pochette. Je n'ai jamais revu la fille de l'avion.

En concert ce 21 mars à la Rotonde du Botanique avec également Benjamin Schoos, Marie-France et Marc Morgan et les Obstacles. Sioux there !

http://www.mademoisellenineteen.com/

3 commentaires:

Elro"V" a dit…

Chanson que tu as chantée à Bxl (au centraal).

Magnifique!!!

Elle en a de la chanson Mlle 19.

V

Mélusine a dit…

En lisant ceci, je pense à cette chanson là
http://www.youtube.com/watch?v=mohTdeHFOlM

Anonyme a dit…

Prends son sourire et pars au loin, il te réchauffera dans les jours sans fin.
Croise les regards de ses doux yeux,
ils t'éclaireront dans les nuits sans feu.
Dans ta tête, imagine tout ce que tu désires, toi qui rêves d'encore ressentir.
L'inconnue à la bague au doigt ne saura jamais ce qu'elle restera pour toi.

Akasha