Coup classique à répétition. On croit le truc bouclé, complet, achevé. La réécoute après le "earbreak" apporte souvent quelques lumières. Il y a des choses en trop, des redites. Des choses évoquées maladroitement dans certaines chansons. Et ces mêmes choses se retrouvent clairement exprimées dans d'autres. Donc il faut élaguer et sans regret. Toi oui, toi non. Dur cependant, dur dur de dire non à une chérie que l'on a tant aimée jusqu'au bout et depuis le début, jusqu'au moment crapuleux et injuste de la mise en perspective, du scénario définitif. Mieux vaut quelques minutes de moins que quelques minutes de trop. Paradoxalement il manque quelque chose. Quelque chose de très simple et de répétitif en l'occurrence. Un groove en dessous de la ceinture avec des paroles stupides en apparence, genre un texte de 4 phrases répétées ad nauseam. Je consulte mes carnets. Une phrase lâchée au Lac de Garde en février dernier par Tof, le baroudeur international lors d'un souper à la pizzeria du coin où nos éclats de rires sonores et gras ont fait sourire à maintes reprises un couple de lesbiennes installé à la table à côté. "Chacun mon tour et moi d'abord". Ok pourquoi pas. Je commence par un battement de main sur chaque temps que je double à 6 reprises. Ensuite j'ajoute un phrase de Dobro jouée avec un bottleneck. Je place les voix, une grave, une au milieu et une en haut. Toujours les mêmes phrases, tout le temps tout le temps tout le temps : "chacun mon tour et moi d'abord, je passe le premier, t'attends dehors". 4 phrases qui résument très simplement la chose humaine en général et publique en particulier. Ensuite je place un orgue dans les basses, vraiment grossier et vulgaire mais qui secoue comme il faut. Et un kazoo pour la touche rigolote. Et je double le Dobro avec une Gretsch désaccordée. Ce qui donne au final la chanson idéale pour ouvrir l'album. Seulement méfiance ! Car les dernières mesures enregistrées nous semblent toujours les meilleures. Mais il est évident que la "petite dernière" apporte quelque chose en plus. Méfiance encore quand on coupe d'un côté pour allonger de l'autre. C'est de la navigation sans réelle visibilité. On sait ce qu'on laisse derrière sans savoir ce qu'il y a devant. L'enfer de la tracklisting... Tracklist. Elle est apparue simple, assez logique au sortir de l'église. Puis je l'ai revue à l'inverse. Le résultat est sans appel. Là où la première semblait quelque peu somnolente mais remplie d'un charme suranné, voire rétif mais bienveillant, la seconde surgit bondissante et volontaire, très "zinzin"... pour se clôturer en douceur et vol plané, sans moteur, "on se posera où l'on pourra". Sur une plage d'Ostende par exemple. C'est terrible. Voici venir les réunions avec la maison de disque, décisions, timing, stratégie ( je me marre doucement ici). Pochette, clips, réclame, radio, graphie, presse, autopsie, service après-vente. Convaincre, appuyer et défendre la démarche d'un double album sans aucune espérance commerciale, pour le plaisir. Des fans et du mien. Cela me plairait pas mal aussi de court-circuiter le marché des concerts et festivals habituels, j'en ai déjà fait le tour plusieurs fois, avec plusieurs groupes, en plusieurs langues et la perspective d'un nouveau tour de Wallonie-Bruxelles ne me réjouit guère. A part les Nuits Botanique au Musée, dans le Salon comme en 2009. A moins de le penser de façon impromptue, saugrenue, inhabituelle. Jouer exclusivement dans des églises par exemple, tout le monde assis, sans bar bruyant dans le fond. Jouer dans des jardins. Un truc vraiment pas rock'n'roll, sans bras levés ni guitares dans les airs ni regards hagards empruntés à Jim Morrisson. Un truc vraiment rock'n'roll en fait, sans pub sur Facetruc ou sur Truc FM. On verra bien.
Cliché de Kateri Tekakwhita dite "Celle qui avance en hésitant" ce qui me correspond pas mal.
P.S. : 4 belles dates de concert en prévision pour l'automne avec 4 projets différents, stay tuned ...